Hugues Demeude Journaliste reporter, auteur-réalisateur

Rédaction d'articles pour Beaux-Arts magazine, le journal de l'exposition.
Exposition à la Pinacothèque L’or des Incas, Origines et mystères.

Soudain, là-haut, le Machu Picchu
Dans une épopée à la Spielberg, l’historien aventurier Hiram Bingham découvrit il y a cent ans la plus célèbre cité inca, y voyant le plus beau temple de l’empire.

« Quand Arteaga apprit (...) que nous étions à la recherche du palais du dernier Inca, il dit qu’il y avait quelques belles ruines dans les alentours (…) sur une crête appelée Machu Picchu ». En ce 24 juillet, l’explorateur américain Hiram Bingham touche au but. Suite à ses lectures assidues des chroniques du XVIè s. sur le monde inca, et après plusieurs années passées à sillonner les Andes péruviennes, sa persévérance est récompensée.

Sans doute pour la millième fois, dans ces voyages qui l’ont mené des cimes arides aux vallées verdoyantes du piémont amazonien, un paysan indien, - en l’occurrence ici Melchor Arteaga -, le met sur une piste. Et pour la millième fois, il s’échine à la vérifier. Même si pour cela il faut franchir une rivière en crue, et escalader une montagne escarpée « en ne nous retenant que par les ongles à certains moments ».
Au bout de ses efforts, à 2 430 m d’altitude et 600 m en surplomb de la rivière Urubamba, cet archétype d’Indiana Jones est sous le choc : « Tout à coup, nous nous trouvâmes en face des ruines de deux des constructions les plus élaborées et les plus intéressantes de l’Amérique Précolombienne » se remémore-t-il dans son ouvrage La fabuleuse découverte de la cité perdue des Incas paru à New York en 1948.
Après trois cents cinquante ans de mise en sommeil, disparue de la mémoire des hommes, il vient de réveiller cette belle endormie enfouie sous un épais manteau de végétation. Pour lui, cela ne fait plus de doute, il vient de découvrir la cité refuge de l’Inca Manco, le dernier des empereurs à avoir résisté aux espagnols.


« Capitale du dernier Inca ou le lieu de naissance du premier d’entre eux ? »

Souvent considérée comme la huitième merveille du monde, Macu Picchu, « la vieille montagne » en quechua, est alors méticuleusement inventoriée par Bingham. Cette citadelle inca du XVè s. comprend 200 constructions dont de nombreux sont à caractère religieux : des temples qui entourent la place Sacrée, des édifices cérémoniels, une grotte appelée par Bingham « Tombe royale », et même le très précieux Intihuata. A la fois cadran solaire, calendrier, et indicateur des points cardinaux, cet autel était une fenêtre sur le territoire des Dieux. Tant et si bien que Bingham s’interroge : « Est-ce la capitale du dernier Inca ou le lieu de naissance du premier d’entre eux ? »

Même si ces deux hypothèses ne sont pas retenues aujourd’hui par les spécialistes, les questions sur la nature et la fonction de cette cité perchée demeurent : presque tous les squelettes exhumés étant féminins, s’agissait-il d’un aclla, un gynécée des femmes dévolues à l’Inca, les vierges du Soleil ? Etait-ce donc un temple religieux consacré au Soleil ? Ou plus simplement, une tour de contrôle inviolable aux confins de la vallée sacrée de l’Urubamba, à proximité des territoires rebelles des hommes de la forêt ? Autre hypothèse couramment admise : il s’agirait d’un lieu stratégique de productions agricoles, en zone tropicale, conçu au milieu du XVè s. par Pachacuti, le fondateur visionnaire de l’Empire inca. Quoiqu’il en soit, Bingham fit ce jour là une découverte en or.

Hugues Demeude


Exposition à la Pinacothèque L’or des Incas, Origines et mystères.

Le glossaire essentiel

Avant les Incas. Dès 1 500 avant notre ère apparaissent des cultures andines qui s’épanouissent et se succèdent jusqu’à l’émergence unificatrice de la civilisation inca. Les Chavin, Paracas, Nascas, Mochica, Huari, Lambayeque, et Chimu, produisirent des masques, poteries, vêtements, bijoux et autres objets cérémoniels, qui témoignent de leur haut degré de culture.

Chavin (Env. de 1500 à 400 av. JC) : Un centre de pouvoir à dominante religieuse s’affirme autour du sanctuaire de Chavin de Huantar, à 3 100 m d’altitude, et connaît son apogée entre – 800 à – 500. La culture Chavin, qui généralise l’usage de l’or dans la fabrication des parures, rayonne jusqu’aux côtes nord et sud de l’actuel Pérou, laissant des vestiges sur les territoires des Lambayeque et Paracas. De fait, elle apparaît comme la mère nourricière des civilisations andines.

Paracas (Env. de 800 av. JC à 200 ap. JC) : A 250 km au sud de l’actuel Lima, entre les vallées d’Ica et de Pisco, vivait avant notre ère ce peuple de pêcheurs réputé pour la splendeur de ses textiles, en laine et coton. Particularité : vivant en bordure du désert côtier dont ils tirent leur non, les Paracas momifiaient leurs défunts en les entourant de tissus de façon à constituer un « paquet funéraire », un fardo, avant de les regrouper dans des nécropoles collectives sous les sables conservatoires.

Nascas (env. 300 av. JC, 600 ap. JC) : La culture Nasca succède à celle des Paracas dite Necropolis. Ils parviennent à construire d’ingénieux systèmes pour irriguer les terres arides de leur littoral. Remarquables céramistes, les Nascas sont aussi les auteurs d’étranges géoglyphes géants, dont les formes très stylisées apparaissent nettement depuis le ciel.

Mochica (200 av. JC – 600 ap. JC) : Entre les vallées de Moche et de Chicama, au nord du Pérou, s’épanouit vers 200 avant notre ère la culture mochica. Société puissante de paysans et de militaires, elle s’est singularisée en construisant de gigantesques pyramides en briques d’adobe. Celles de Moche à proximité de Trujillo figurent parmi les plus importantes. Les céramiques et poteries polychromes mochicas sont très réputées.

Huari (600 ap. JC – 1000 ap. JC) : La culture huari se développe sur les hauts plateaux autour d’Ayacucho au moment où les Mochicas déclinent. Grands bâtisseurs, ils passèrent maîtres dans la construction des terrasses pour améliorer l’agriculture.

Lambayeque (700 ap. JC – 1100 ap JC) : Contemporaine des Huaris, la société Lambayeque, ou Sican, fleurit sur la côte nord du Pérou durant le déclin des Mochicas. Très réputée pour sa production d’orfèvrerie.

Chimu (1000 ap. JC – 1460 ap JC) : Succédant aux Huaris, le royaume Chimu fleurit autour de sa capitale Chan Chan. S’appuyant sur une agriculture productive et une organisation administration efficace, il s’étend sur plus de 1 200 kms de côtes au Nord du Pérou. Les Chimus brillèrent dans l’art de la poterie et de l’orfèvrerie, si bien que lorsqu’ils furent attaqués et vaincus par les Incas en 1460, de nombreux orfèvres furent emmenés de force à Cuzco, la capitale de l’empire inca.

Hugues Demeude